Le législateur fédéral s’engage dans la lutte contre la reconnaissance frauduleuse d’enfants, c’est-à-dire la reconnaissance d’un enfant dans le seul but d’obtenir un droit de séjour dans notre pays. Des peines plus sévères et un kaléidoscope de nouvelles compétences pour les juges et les officiers de l’état civil sont prévus pour en finir avec les abus.
En effet, les abus sont de plus en plus fréquents, et cela va parfois même jusqu’à la conception effective d’un enfant afin d’obtenir un droit de séjour après la reconnaissance de celui-ci. Il s’agit de situations dans lesquelles l’enfant et l’autre parent seront abandonnés par après. Des moyens légaux consistants pour agir contre cette problématique manquent encore à présent. Il est par exemple déjà possible de retirer de faux permis de séjour et d’annuler, sur réquisition du ministère public, des reconnaissances frauduleuses de la paternité sur la base du Code judiciaire, mais ces instruments paraissent insuffisants pour mettre fin aux abus croissants.
Peines sévères
C’est donc la raison pour laquelle le législateur crée un nouveau cadre juridique qui prévoit l’incrimination des ‘reconnaissances frauduleuses’ dans le cadre de la Loi sur les étrangers.
Les peines d’emprisonnement et les amendes seront identiques à celles qui s’appliquent pour les mariages de complaisance et les cohabitations légales de complaisance. Pour ce qui concerne l’infraction de base, cela signifie que les contrevenants risquent d’être punis d’un emprisonnement d’un mois à trois ans et d’une amende de 50 à 500 euros. En cas de circonstances aggravantes (par exemple, une reconnaissance contre de l’agent ou l’utilisation de la violence), cette peine peut aller jusqu’à cinq ans d’emprisonnement et une amende de 5.000 euros. Mais attention car les tentatives seront elles aussi sanctionnées sévèrement. Les contrevenants risquent d’être punis d’un emprisonnement jusqu’à trois ans et d’une amende juqu’à 2.500 euros.
Annulation de la reconnaissance par le juge
Le juge répressif sera habilité à prononcer la nullité de la reconnaissance lorsqu’il condamne une personne du chef de reconnaissance frauduleuse, comme cela est déjà possible à présent pour les mariages de complaisance et les cohabitations légales de complaisance. Cette nouvelle compétence du juge va aussi être inscrite dans le Code judiciaire.
Des compétences plus larges pour les officiers de l’état civil
Il s’agit donc clairement d’une approche pénale, bien que la loi apporte aussi des adaptations sur le plan civil, avec, en premier lieu, une série de nouveautés pour les officiers de l’état civil. Ceux-ci auront la possibilité de surseoir à acter une reconnaissance frauduleuse présumée et de refuser de l’acter. A cette fin, une définition précise de la notion de ‘reconnaissance frauduleuse’ sera insérée dans le Code civil. En outre, il sera conféré au ministère public le droit de poursuivre la nullité des reconnaissances frauduleuses et la compétence du notaire d’établir un acte de reconnaissance sera supprimée.
Code consulaire
La nouvelle approche requiert enfin aussi une adaptation du Code consulaire. La réglementation relative à la compétence territoriale des postes consulaires de carrière sera modifiée. Un enfant ne pourra désormais être encore reconnu devant le chef d’un poste consulaire de carrière que si l’auteur de la reconnaissance est belge et domicilié au sein de la circonscription consulaire. Dans ce cadre, la compétence territoriale du procureur du Roi sera également adaptée.
Entrée en vigueur : pas pour toute de suite
Etant donné qu’il s’agit d’une réforme considérable, la loi du 19 septembre 2017 ne va pas produire ses effets immédiatement. Son entrée en vigueur effective dépend de la mise au point de toute une série de dispositions d’exécution. Le législateur propose cependant déjà une date limite : la loi doit entrer en vigueur au plus tard le 1er avril 2018 (le premier jour du sixième jour qui suit celui de sa publication au Moniteur belge).
En outre, plusieurs dispositions transitoires sont prévues : les dispositions ne s’appliqueront qu’aux reconnaissances dont la déclaration est faite après l’entrée en vigueur ET aux nouvelles actions en recherche de maternité, de paternité ou de comaternité introduites en première instance après l’entrée en vigueur de la loi.
Source: Loi du 19 septembre 2017 modifiant le Code civil, le Code judiciaire, la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers et le Code consulaire, en vue de lutter contre la reconnaissance frauduleuse et comportant diverses dispositions en matière de recherche de paternité, de maternité et de comaternité, ainsi qu’en matière de mariage de complaisance et de cohabitation légale de complaisance, MB 4 octobre 2017.